Il y a un peu plus d'un an, j'ai demandé à un spécialiste de "l'argent sur le web" (si on peut l'appeler comme ça), d'analyser mon blog afin de connaître les points à améliorer et ce, dans l'optique de "vivre de mon blog". Je dois t'avouer que son analyse fut un peu contrariante. Il me dit qu'en utilisant des mots comme nostalgie, mélancolie et doute, jamais au grand jamais, je ne pourrais devenir une star du web 2.0. Qu'il fallait que j'oriente mes articles de manière plus positive, et surtout, que mon blog "serve à quelque chose". Comme je ne suis jamais contre un petit défi, cette dernière année, j'ai tenté tant bien que mal d'arrêter de coucher mes doutes sur la toile et de devenir cet exemple que je voulais être. Te faire voir que la vie est belle. Parce que je pense sincèrement que la vie est belle, et t'aider à voir le verre à moitié plein était un challenge que je trouvais très beau.
Quelque temps plus tard, j'assistais à mon fameux week-end entrepreneur. Je me souviens, durant ce week-end une intervenante nous a donné un cours de "speech", sur le "comment se vendre". Son témoignage a été éloquent et motivant. Pourtant une phrase m'a hantée toute cette année : "Personne ne veut travailler avec un geignard". Autrement dit, quand tu es entrepreneur, personne ne doit savoir les difficultés que tu traverses. C'est mieux de ne pas en parler. Personne ne veut savoir que tu es au bord du gouffre, que tes chiffres sont mauvais, que tu ne vends pas, parce que personne ne veut travailler avec ces gens-là. Et dans le fond, je pense qu'elle n'a pas tout à fait tort. Si nous devions remettre cela à l'image de l'entretien d'embauche, il est vrai qu'aucun employeur ne t'engagera si tu as le discours de : "Personne ne veut m'engager, je suis triste et malheureux, je vous en supplie prenez-moi".
Oui mais.
Entre Monsieur Argentsurleweb et Madame Arrêtedeteplaindre, je me suis mis une pression de dingue. Pour pas changer. Alors c'était donc ça ? Plus jamais je ne pourrais te parler ici de mes doutes, de mes peurs, de mes angoisses, de ce que je ressens... Non, je me devais d'être cette fille qui te faisait rêver, tant sur le blog, que sur Instagram, que partout où mon clavier trainerait. Or pourquoi j'ai commencé à bloguer ? Parce que j'avais besoin de parler. Parce que j'ai toujours tenu un journal intime mais que celui-ci, à part m'aider à me libérer de mes émotions, ne m'aidait pas beaucoup en terme d'échange. Moi j'avais besoin de partager, de parler, d'avoir un retour. J'ai toujours écrit, toujours, et j'ai toujours eu une certaine mélancolie dans mes mots, c'est d'ailleurs dans mes moments de faiblesse que j'ai toujours trouvé le mot juste, la bonne tournure de phrase. Je ne suis pas de celle qui décortique, analyse, et entre nous, même si j'adore me pomponner, me faire une beauté et tripatouiller mes doigts dans des palettes, c'est toujours un exercice de style difficile pour moi de t'écrire une revue. Si dans la vie de tous les jours je suis un clown (tu peux d'ailleurs le voir sur mes vidéos), sur le blog, ici, j'ai toujours été Odile Sacoche. Une anonyme qui en avait gros sur le coeur et qui avait besoin de le dire.
Récemment je t'ai beaucoup parlé du succès, des chiffres, et j'ai bien compris que tu ne comprenais pas pourquoi. Finalement, qu'est-ce que j'attends moi de tout ça ? Est-ce que je suis devenue fausse ? Est-ce que tout ça m'est monté à la tête ? Je ne pense pas. La suite est en fait très simple. L'argent a tout changé. Dans le monde du business, ce sont les chiffres qui priment. Il ne faut pas chercher très loin pour confirmer ma pensée. Plus tu as de l'expérience dans un boulot, plus tu seras payé. Plus tu as des chiffres sur le net, plus tu seras vu par les grandes marques. Et qui est-ce qui offre des contrats ? Les grandes marques ! Le calcul est donc simple. Rassure-toi, je ne fais pas ici parler mon égo, ou mon narcissisme mal placé. Et c'est justement parce que ce n'est pas mon égo qui parle que c'est difficile, car la performance, ce n'est pas moi. Je suis perfectionniste, certes, mais jamais je n'ai été pour la performance. La performance m'angoisse. Enfant, ado, je faisais tout, tout, pour ne plus être la première de classe (à la grande tristesse de ma maman qui me disait que je gâchais mon potentiel). Je me contentais du minimum car d'une certaine façon, même si je voulais briller, je n'ai jamais assumé d'être "la meilleure". Je n'ai d'ailleurs jamais voulu l'être. C'est paradoxal, non ?
Je pense que dans un coin de ma tête, un jour la gloire allait me tomber dessus, comme ça, un beau matin. Un peu comme quand tu te promènes en rue et qu'un chasseur de tête te repère parce que tu es belle, ou grande, ou mince, ou que ta voix est hors du commun et qu'il a absolument besoin de toi pour son dernier film. Je te dis ça parce que c'est arrivé à mon ancienne collègue qui a une voix atypique. Tu vois ? Le vieux fantasme quoi. Un peu comme quand tu es célibataire et que tu penses que tu rencontreras l'homme de ta vie en lui renversant ton verre de vin, sur sa chemise, à un mariage... La réalité en est tout autre.
Bref, si je te raconte tout ça, c'est parce que toutes ces pensées me travaillent de plus en plus. Est-il possible de réussir sur le web ? Quels sont les paramètres pour y arriver ? Faut-il pour autant être à la maison H24 afin de pouvoir écrire un article par jour ? Y consacrer tout son temps, tout son argent ? Bosser comme une dingue chaque minute que tu as de libre ? Quels sont ces "efforts" à faire ? Plus d'un an après avoir pris mon statut de freelance, je ne suis plus sûre de rien... Je me demande si tout cela n'était pas juste une utopie. Parfois je me dis que je n'ai pas assez de talent, que ce blog devrait rester mon hobby. Tout simplement, sans prise de tête. Finalement, je gagne très bien ma vie 38h par semaine, et ce que je fais, je le fais plutôt bien. Pourquoi ne pas m'en contenter et me donner à fond là-bas, dans la vraie vie, dans le concret ? Comment savoir si ce n'est pas là qu'on me donne ma chance, et que c'est là, que je suis censée briller ?
Hier, je regardais une vidéo de Maya Shameless, une artiste YouTube que j'ai découvert très récemment et que j'admire beaucoup. Et c'est dingue comme elle a exactement mis les mots sur tout ce que je ressens. Devrais-je arrêter ? A quel moment on se dit qu'on a trop investi ? L'humoriste Jeremy Ferrari dit dans toutes ces interviews que l'émission "On ne demande qu'à en rire" était sa dernière chance après 10 ans de refus et de déception. A quel moment tu sais que c'est justement LE moment ? A quel moment tu te dis qu'il faut arrêter ? Ce qui est fou, c'est qu'en ce qui concerne Maya Shameless, qui vit de YouTube, c'est que, même elle, avec ces 700.000 abonnés se rend compte que ça ne suffit plus. Que ses chiffres diminuent, et que oui, ces fameux chiffres sont important pour vivre du web.
Je ne veux pas devenir celle que je ne suis pas. J'ai toujours été naturelle. Je n'ai jamais eu peur d'aborder des sujets ici, jamais eu peur de te montrer mes faiblesses, mes doutes, mes peurs et je pense que c'est ça aussi qui a fait que tu es venue me lire. Qui a créé entre toi et moi un lien indescriptible. Chaque jour je te suis si reconnaissante de me donner la chance de vivre tout ce que j'ai déjà pu vivre : quelques contrats, quelques campagnes, la création de ma marque d'accessoires,... Mais j'aime aussi ma vie réelle et je prends tellement de plaisir à lézarder au soleil, lire un bon livre, regarder une bonne série, tandis que cette culpabilité de ne rien faire devient de plus en plus grande. La culpabilité de simplement "profiter" de la vie, plutôt que de passer mes soirs et mes week-ends à investir et à bosser pour rentabiliser mes choix (les cotisations, le comptable, les emprunts,... ). J'ai toujours été la première à dire qu'il fallait croire en ses rêves, mais je me dois aussi d'être honnête, comme je l'ai toujours été. J'aimerais que ce soit "facile", j'aimerais ne plus parler "d'efforts". Alors aujourd'hui je me demande : "Et si tout ça n'était pas pour moi ? A quel moment doit-on se dire qu'on est sur le mauvais chemin et qu'il faut juste... Arrêter ?"
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