L'art de se culpabiliser.

Je culpabilise un peu de ne t'écrire pour le moment que des articles beauté. En fait, quand on me connait, ça parait tout à fait normal que je culpabilise. Parce que c'est ma spécialité ça, me sentir coupable. Pour un oui, ou pour un non, je jauge, je calcule, je pense, je me flagelle. Je culpabilise si je passe une soirée au resto avec des amis et que je suis malade, parce que j'aurai gâché la soirée. Je culpabilise si je recommande quelque chose à quelqu'un et qu'il n'y a pas trouver son compte. Je culpabilise de dépenser mes sous durement gagnés au travail, me disant que je ferai mieux de les garder sagement "au cas où", ou pour payer les factures. Je culpabilise de ne plus avoir fait de sport depuis 2 mois, moi qui aimait tant ça. Je culpabilise de préférer choisir une sortie entre amis, plutôt qu'une soirée cocooning. Je culpabilise quand je vais me coucher trop tard, parce que je serai forcément fatiguée le lendemain. Je culpabilise d'organiser trop de chose, mais quand je ne fais rien, je culpabilise aussi. Partout, tout le temps, je culpabilise.

Je ne sais pas quand cette sale manie est née. Dans la petite enfance sans doute, quand tes parents te grondent parce que tu as été une vilaine fille, que tu as fait une grosse bêtise et que tu promets que tu ne le feras plus. Malheureusement, tu le refais, tu déçois, et commence ce long processus de culpabilisation. A l'école aussi, on te fait vite comprendre que tu dois avoir de beaux points, que tu ne dois pas rester sur tes lauriers, que tu dois rentrer dans des standards. Pour peu que tu ai eu une éducation un peu religieuse, vient la notion du pêché, du bien, du mal, du paradis et de l'enfer. Et plus tard, quand on devient adulte, on continue ce joli petit schéma de culpabilisation.

On se sent mal, on ne se sent pas assez bien. On veut être comme les autres. On louche sur notre voisin qui à l'air plus heureux, parce que c'est connu, l'herbe est plus verte ailleurs. On veut lui ressembler, et quand on atteint son but à lui, qui ne fera pas forcément notre bonheur à nous, on se culpabilise. On se dit que c'est nous qui ne sommes pas normaux, que si notre voisin est heureux lui avec son grand jardin, ce n'est pas normal que nous ne soyons pas heureux, nous, avec ce même jardin. On se dit que le problème c'est nous. Qu'on doit changer, qu'on doit aspirer à mieux, qu'on doit prendre plus de cours, avoir plus d'argent, être mieux. Et que surtout, surtout, si on y arrive pas, c'est notre faute : on ne doit pas essayer assez bien. Alors voilà. On culpabilise.

Je ne déroge pas à cette règle. Moi aussi je suis dans la culpabilité constante. Comme je te dis, je me suis mise à culpabiliser de ne plus écrire d'article humeur. Me justifiant entre moi et moi même, et m'autorisant de faire ce que j'avais envie de faire. Le pire dans tout ça ? C'est que personne ne m'a rien dit. Je tire des conclusions basées sur du vent, continuant ainsi ma petite auto-flagellation. Alors qu'on sait bien, toi et moi, que le succès du blogging, c'est de faire ce qui nous fait plaisir, en légereté.

On sait bien, qu'on ne peut pas passer sa vie à bosser juste pour payer ses factures. On sait bien qu'on a parfois juste envie de rentrer chez soi pour profiter de l'instant présent. On sait bien que manger un bon gros gâteau peut nous faire énormément de bien. Que ce n'est pas si grave de rester une soirée devant sa télévision. De lézarder sans rien faire. Seulement voilà, on veut juste rentrer dans les standards. C'est normal, c'est humain. On veut appartenir au groupe. Ne pas être le mouton noir tout seul là, au fond, tel un mauvais élève. Ne pas subir de moquerie, ne pas être trop regardé, ne pas être pointé du doigts. On veut être comme tout le monde, et si on ne le devient pas, culpabilité te voilà !

Et pourtant, si tu savais comme on a tort. Comme j'ai tort de me justifier 24h par jour. Parce qu'en vrai, la vie est très simple. On a le droit de faire, comme on a envie de faire, ou même, de ne pas le faire. Nous n'avons aucune obligation d'être mieux que le voisin. Le secret, c'est d'être certes un bon citoyen, sans enfreindre des lois, mais pour le reste, on a le droit de se faire plaisir, d'être qui on veut, sans se justifier. Je te promet. Il n'y a pas de normalités. Il n'y a pas de standard. Il n'y a pas un modèle de réussite, ni une chose qui rend heureux. Ce qui fait plaisir à l'un, ne fera pas plaisir à l'autre. Ce qui donne de la paix à l'un, donnera du fil à retordre à l'autre. Un parcours de Monsieur QuiRéussit, n'est pas forcément LE parcours. Il y a plein de possibilités.

Il faut juste penser : qu'est ce qui me fait plaisir, à moi ? Dans le fond, qu'est ce qui me fait du bien ? Ne regardons plus à côté, la vie n'est pas meilleurs ailleurs, à un autre moment, dans un autre endroit. Elle est belle ici et maintenant. Et elle le sera d'autant plus, si on arrête de se culpabiliser ! A moi de commencer !

♥ ♥ ♥

Crédit photo