dimanche 11 octobre 2015

Un monstre dans mon placard

Je ne sais pas exactement comment il m'a attrapée. Ni quand il est arrivé dans ma vie, à quel moment, et surtout pourquoi. Il avait du entrer par la porte, ou par la fenêtre laissée trop longtemps ouverte un matin de septembre. Il était peut-être latent depuis longtemps, tapis dans l'ombre, attendant que je n'y fasse plus attention. Attendant une sotte distraction de ma part... Non je ne sais pas comment il s'est retrouvé là, devant moi, à côté de moi, comme en moi. Ce que je sais maintenant c'est que, depuis quelques jours, il ne me quitte plus. Je croyais l'avoir complètement chassé de ma vie à coup de phrases positives et de livres qui faisaient du bien. Je pensais m'en être débarrassée... Après tout, je n'avais pas besoin de lui. Parce que personne n'a jamais vraiment besoin de lui...


Et pourtant...


Pourtant, c'était un matin que je me suis rendue compte qu'il était réapparu dans ma vie. Je me levai dans la pénombre et je le sentis. Juste là. Comme une boule qui coince dans la poitrine. J'ai pris une grande bouffée d'air et j'ai expiré tranquillement. Je croyais que ça l'avait fait partir, du moins, pour un moment. Et comme chaque matin, j'ai entrepris cette routine qui m'était propre : me lever, me rafraichir, boire de l'eau, sortir le chien, me préparer, partir. Mais c'est lorsque j'étais dans le bus du retour que je me suis rendue compte qu'il était de nouveau à mes côtés. Il m'observait, tel un prédateur. Sans dire bonjour, sans me demander comment j'allais, il a commencé à me parler, comme s'il me connaissait par cœur. Le pire je crois c'est que j'ai tenté de lui répondre. De me justifier. Et plus je bredouillais, plus il se faisait insistant.


Mais il ne faut jamais lui répondre...


Ce soir là j'ai su qu'il allait rester pour un moment sans que je ne sache rien y faire. Une part de moi savait que c'était la pire chose qu'il pouvait m'arriver. Et depuis, c'était un ballet de paroles, un torrent de mots qu'il m'offrait chaque jour. Le matin, il me regardait quand je me brossais les dents et me susurrait à l'oreille que j'étais nulle. Le soir, il lui arrivait de me dire que j'étais moche, que je n'étais qu'une bonne à rien, que je n'y arriverais jamais. De ses yeux perçants, il me piquait, il me narguait, il me rabaissait. Il reprenait les éléments du passé, les erreurs que j'avais commises, mes échecs, et il me les balançait toute la journée. Il tentait de me raconter mon futur encore inexistant, qui, selon lui, serait aussi sombre que sa personne. Et je me laissais faire. Je le laissais me caresser la joue. Impuissante, je le laissais me dominer en baissant les yeux.


Mais il ne faut jamais baisser les yeux...


J'ai bien tenté de le combattre en le frappant à coup de livres. J'ai essayé de l'épuiser en l’emmenant au sport avec moi, me disant qu'il n'y survivrait pas. Je l'ai pris avec moi chez des amis, en pensant que ça lui ferait du bien. Que le bon temps l'éloignerait. Mais il revenait. Agissant dans mes rêves, pour les transformer en cauchemar. Il était là le matin, le midi et le soir. Quand je buvais, quand je mangeais, quand je prenais ma douche. Chaque minute, chaque seconde. Comme un nouveau meilleur ennemi.


Et alors que je me demandais comment me débarrasser de lui, j'ai eu envie de lui écrire ici pour lui dire que je n'avais pas peur de lui. Du moins, pas vraiment. Qu'il pouvait bien rester un moment dans ma vie, tentant de me paralyser, j'arriverais à le chasser tôt ou tard. Que je n'avais que faire de ses questions, et même si je n'avais pas toutes les réponses, que je finirais bien par les avoir. Je finirais par avancer, car dans la vie, c'est ce qu'on fait de mieux : avancer. Qu'il pouvait bien aller trouver une autre proie, elle passerait peut-être par ici pour lui dire elle aussi qu'on est tous et toutes bien plus forts que ce qu'il veut bien croire. Qu'on est des battants. Que nous n'avons pas besoin de lui pour ressasser un passé qui n'existe plus, et nous parler d'un futur qui n'existe pas encore. Que ce qui compte c'est le présent.


Le présent, enroulé sous mon plaid en regardant une série. Le présent, reprenant mes stylos pour dessiner et ne plus y penser. Le présent, préparant le breakfast pour des amis. Le présent, à siroter un bon thé. Le présent, tapotant sur mon ordinateur. Le présent : tous ces bons moments où il n'a pas sa place. Oui, le présent, sans lui. Lui, qui chasse nos rêves, nos espoirs, nos ambitions. Lui qu'on ne devrait jamais laisser entrer, qu'on ne devrait jamais écouter. Lui, ce monstre dans mon placard,...


Lui... Le doute.


Car le doute tue plus de rêve que l'échec ne le fera jamais et aujourd'hui il est temps de sortir nos capes de chasseurs de monstres.


♥ ♥ ♥

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